Bonnes pratiques juridiques  Publié le 20/08/2019

Salarié en état d’ébriété : les questions à se poser pour (ré)agir à bon escient

Vous êtes informé qu’un individu, se trouvant dans une camionnette de votre société, parle très fort et semble visiblement éméché. Vous vous rendez sur les lieux et constatez la présence d’un de vos salariés, un chauffeur livreur, dans la camionnette, en dehors de ses heures de travail, assis sur la banquette avec des bières. Il est visiblement en état de forte imprégnation alcoolique.

Des mesures immédiates, notamment de sécurité, sont à adopter et doivent être suivies d’une analyse de la situation et de son contexte pour prendre ensuite la décision adéquate, pouvant aller jusqu’à une sanction.

Comment réagir face à ce type de situation ?


Dans un premier temps, il appartient au manager ou au chef d’entreprise, ou au chef d’équipe (selon la situation, l’effectif et la taille de l’entreprise) de prendre les mesures adéquates : lui faire passer un test d’alcoolémie en présence d’un tiers comme témoin (à condition que ce soit prévu dans le règlement intérieur ou par une note de service et que les fonctions occupées par le salarié soient de nature à exposer les personnes ou les biens à un danger) et le faire prendre en charge par le SAMU ou les pompiers. Ultérieurement, le responsable pourra organiser un entretien individuel avec le salarié et faire ses remarques sur la base de faits et d’exemples précis.

Dans un deuxième temps, il convient d’évaluer l’impact de l’état d’ébriété sur le travail, et d’éventuellement prendre une sanction qui soit proportionnelle à la faute. Pour cela, il est préférable que le manager se mette en lien avec sa hiérarchie ainsi qu’avec la direction des ressources humaines.

Notions de base


Le rôle du DRH :

  • encadrer, dans le règlement intérieur, la consommation d’alcool dans l’entreprise, prévoir les modalités d’un éventuel contrôle d’alcoolémie, et préciser les sanctions encourues par les salariés ne respectant pas la règlementation ;
  • vérifier l’imprégnation alcoolique du salarié dans le respect des droits du salarié ;
  • sanctionner le salarié qui consomme ou introduit de l’alcool dans l’entreprise en violation du règlement intérieur ou qui se trouve en état d’ébriété sur le lieu de travail.

Nous savons que :

  • aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n’est autorisée sur le lieu de travail (article R. 4228-20 du Code du travail) ;
  • la loi interdit aux personnes ivres d’entrer ou de séjourner sur un lieu de travail (article R. 4228-21 du Code du travail).

Se poser les bonnes questions


1- Un véhicule professionnel représente-t-il un lieu de travail ?

Oui. Les locaux de l’entreprise, mais également le véhicule professionnel, sont considérés comme des lieux de travail.

Ainsi, un routier consommant des boissons alcoolisées à bord de son camion est considéré comme un employé consommant de l’alcool au travail. Il en va de même pour un commercial qui se déplace auprès de fournisseurs ou de clients avec un véhicule de société.

2- Un salarié peut-il être sanctionné par son employeur pour un état d’ébriété constaté en dehors du temps de travail ?

Non. Un salarié ne peut pas être sanctionné par son employeur pour un état d’ébriété constaté en dehors du temps de travail car il s’agit là de la vie privée du salarié. En revanche, il peut l’être si son taux d’alcoolémie est encore élevé au moment de sa prise de poste journalière, bien entendu.

Toutefois, certaines conséquences de l’état d’ébriété du salarié en dehors de son temps de travail peuvent jouer en la défaveur du bon fonctionnement de l’entreprise. Il s’agit, par exemple, d’un commercial qui a besoin de se déplacer en voiture tous les jours ou d’un routier qui doit conduire un camion quotidiennement. Cela fait partie de leur fiche de poste. Or si un tel salarié se fait retirer son permis de conduire suite à une infraction d’état d’ébriété, même si cela arrive pendant son temps personnel, cela va impacter sa vie professionnelle puisqu’il ne pourra plus réaliser les missions relatives à ses fonctions pendant une période donnée.

Cela est considéré comme un manquement au contrat de travail car la bonne exécution du poste ne peut plus être effectuée (Cass. soc., 2 déc. 2003, n° 01-43.227).

3- Des faits d’ébriété relèvent-ils de la vie personnelle lorsqu’ils sont commis hors du temps de travail mais dans l’entreprise ?

Des faits commis hors du temps de travail du salarié, mais dans un local de l’entreprise, peuvent être considérés comme relevant de la vie professionnelle (Cass. soc., 27 juin 2001, n° 99-45.121).

4- S’agit-il d’un acte unique ou d’une succession de faits ?

Il s’agit d’apprécier les faits en fonction de l’ancienneté et du poste occupé.

Par exemple, il est plus grave et plus dangereux pour un salarié ayant pour mission de conduire les véhicules professionnels de l’entreprise de consommer de l’alcool, plutôt que pour un employé de bureau.

5- Compte tenu des éléments précédents, quelle sanction appliquer ?

L’état d’ébriété sur le lieu de travail entraîne l’application de sanctions différentes selon la sévérité de l’état.

Deux sanctions disciplinaires peuvent être prises à l’encontre d’un salarié manifestement en état d’ébriété sur son lieu de travail : l’avertissement ou la mise à pied.

Il ressort de la jurisprudence que tout état d’ébriété ne justifie pas forcément un licenciement et que, pour pouvoir être prononcé, le licenciement doit être apprécié au cas par cas, par rapport à l’ancienneté du salarié en état d’ébriété, mais aussi aux fonctions exercées par celui-ci.

Auteur : Laurence Ruaux



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