Retours d'expérience RH  Publié le 07/08/2019

Prévention santé : quelles actions privilégier ?

Notre manière de travailler s’est profondément transformée. Le numérique a accéléré le rythme des échanges et a intensifié la cadence du travail : processus, agilité, flexibilité, exigence client, etc. Ce qui n’est pas sans risque sur la santé physique et mentale des salariés. Les troubles musculosquelettiques (TMS) ont été multipliés par dix en vingt ans et représentent 80 % des maladies professionnelles (1). Le burn-out, lui, touche 1 salarié sur 8 (2).

Cela se traduit par de l’absentéisme avec un coût non négligeable pour l’entreprise : en 2018, il s’élevait à 107,9 milliards d’euros pour les entreprises françaises (3).

Au-delà des répercussions financières, tout employeur est tenu de prendre des mesures pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (4). Comment agir efficacement ? Les actions doivent s’inscrire dans une démarche de prévention globale autour de trois dimensions : organisationnelle, individuelle et managériale. Décryptage des actions à privilégier.

Prérequis : la nécessaire évaluation des risques


Avant d’initier une démarche de prévention santé, il faut d’abord dresser un diagnostic de l’organisation : quels sont les facteurs de risques, les irritants, etc. ? L’employeur doit mener une évaluation complète des facteurs de risques auxquels sont exposés ses salariés. En parallèle, et pour une vision plus exhaustive, la réalité du travail vécue par les collaborateurs doit aussi être prise en compte.

Comment ? Une enquête individuelle permet de cartographier les risques et d’identifier les points bloquants de manière plus fine.

Ces données établissent un premier état des lieux qu’il est pertinent de coupler avec d’autres indicateurs :

  • pour « prendre le pouls » des équipes, l’utilisation d’applications numériques se développe en entreprise. Par exemple, l’application Ourco, conçue à l’aide de psychologues du travail, permet au salarié de noter sa réalité professionnelle au travers de plusieurs notions : relation managériale, ambiance, charge de travail, motivation, etc. ;
  • des indicateurs RH tels que le taux d’absentéisme, le nombre d’arrêts maladie ou un faible niveau d’engagement sont à étudier dans le cadre de l’évaluation.

C’est en analysant toutes ces données à la fois organisationnelles et individuelles, puis, quantitatives et qualitatives, qu’il est possible d’identifier les leviers pertinents à activer.

Qui associer à cette initiative ? La démarche de prévention doit être un sujet porté collectivement. S’appuyer sur des équipes pluridisciplinaires, par exemple constituées de représentants du personnel, de représentants des services de santé au travail (médecins, infirmières, psychologues du travail, ergonomes) ou encore de représentants de cabinets experts externes (Aract, Stimulus ou Qualisocial), est un facteur de réussite.

#1 Agir sur la dimension organisationnelle et culturelle


La santé au travail doit devenir un sujet stratégique pour l’entreprise. Le chef d’entreprise, lui-même, doit en faire une priorité. En effet, la santé et le bien-être des collaborateurs sont aussi des facteurs de compétitivité et d’engagement. Plusieurs études récentes montrent qu’investir dans la qualité de vie au travail, le bien-être et la prévention présente des bénéfices pour les salariés, l’entreprise et la société en générale (5).

Pour activer un changement effectif, il s’agit ensuite de changer notre approche de la gestion de la santé en entreprise. Communément, on parle de trois types de prévention :

  • prévention primaire : prévenir le risque ;
  • prévention secondaire : prévenir le dommage ;
  • prévention tertiaire : limiter les effets.

Les deux dernières sont les plus utilisées. Il faut basculer vers une approche de la prévention primaire permettant une éradication des risques le plus en amont possible. Pour information, 65 % des DRH (6) n’ont mis en place aucun dispositif d’anticipation au sein de leur organisation.

En termes d’actions, les responsables RH pilotent les actions de prévention en ouvrant le dialogue sur ces sujets. Avec la direction, c’est à eux de lancer des initiatives organisationnelles fortes et qui ont un impact pour les salariés. Les axes à développer ? Plus de flexibilité des horaires, télétravail, charte sur la parentalité, droit à la déconnexion, moins de rigidité dans les processus, plus d’autonomie, une sécurité renforcée sur des sites, du matériel plus ergonomique, etc. À prioriser en fonction des résultats de l’enquête.

#2 Agir sur la dimension individuelle : devenir acteur de sa santé


En étant sensibilisés via des formations ou des événements, les salariés prennent conscience que la prévention de la santé est un sujet multifactoriel et qu’ils peuvent agir à leur niveau. Des programmes de formation et d’information sur le sommeil, la préservation de l’attention, la nutrition, l’activité physique ou encore l’arrêt du tabac en sont des exemples. L’objectif ? Apprendre à mieux connaître son corps et le rôle que jouent ces facteurs dans son bon fonctionnement. Les salariés se réapproprient leur santé, un premier pas essentiel vers une prévention durable.

De plus en plus d’entreprises optent, en complément, pour des séances d’activité physique ou de relaxation collective : sophrologie, méditation, yoga, boxe, ou encore échauffement avant la prise de poste. Selon David Chérubin, enseignant au sein de l’École nationale de kinésithérapie et de rééducation, « les effets positifs (7) sont avérés, notamment sur la baisse des arrêts de travail ».

Certains salariés portent un handicap visible ou invisible, sont affectés par une maladie chronique ou rencontrent une difficulté dans leur vie personnelle. Il n’est pas toujours simple d’identifier les publics fragiles qui s’expriment peu. En complément, mettre en place des solutions d’écoute est clé. Nature et Découvertes, par exemple, a instauré des cercles de paroles ouverts à tous et anonymes. D’autres optent pour des lignes d’écoute auprès d’organismes spécialisés.

#3 Agir sur la dimension managériale


La relation manager-collaborateur demeure essentielle dans la prévention des risques. À la question « Les relations supérieurs-salariés peuvent-elles constituer un risque pour la santé ? », 60 % des salariés français répondent positivement (8).

C’est pourquoi, toute organisation doit accompagner et former ses managers… au rôle de manager ! En effet, cela exige des compétences humaines spécifiques pour assurer performance et bien-être collectifs. À savoir, favoriser l’intégration et la cohésion, encourager le soutien et l’écoute, promouvoir la convivialité́, prévenir les situations conflictuelles, etc. Former les managers à l’écoute active, l’empathie ou la collaboration peut être une piste d’actions intéressantes pour transformer la culture managériale d’une entreprise.

En complément, il faut également permettre aux managers d’être capables de détecter les risques au sein de leurs équipes, et pour cela, formation et sensibilisation sont la base. Ensuite, il faut aussi tout faire pour instaurer un climat de confiance favorisant des bonnes relations de travail. En effet, une communication plus fluide entre collaborateurs et managers reste le meilleur canal pour capter les points bloquants.

Pour plus d’efficacité et de cohérence, les RH et les managers doivent travailler en tandem sur le sujet de la santé afin de pouvoir détecter les problèmes, les failles, les dangers, etc. et agir en conséquence. Cette approche collective permet de prendre le recul nécessaire et d’activer des leviers complémentaires.

Auteur : Laure Girardot

Sources :
(1) AIST (Association interprofessionnelle de santé au travail)
(2) OIT (Organisation internationale du travail)
(3) Institut Sapiens
(4) Code du travail, art. L. 4121-1
(5) OPPBTP 2016
(6) INRS
(7) Interview My Happy Job, mai 2018
(8) Eurofound, « Enquête européenne sur les conditions de travail », 2015 / EVS (European values study), 2014 / ISPP




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