Bonnes pratiques juridiques Covid-19  Publié le 30/09/2020

Remboursement des frais liés au télétravail : quelles obligations pour l’employeur ?

Les mesures adoptées par le Gouvernement en réponse à l’épidémie de Covid-19 ont conduit bon nombre d’entreprises à expérimenter le télétravail. Aujourd’hui, ces entreprises sont nombreuses à vouloir inscrire ce mode d’organisation du travail dans un cadre plus durable. Se pose alors la question des coûts engendrés par le télétravail : abonnement internet, forfait téléphonique, achat de fourniture de bureau, etc. Dans quelles mesures le salarié peut-il prétendre au remboursement des frais liés à la mise en place du télétravail ?

1) Anticiper


Le télétravail, à la demande de l’employeur, occasionne des frais que les salariés n’ont pas à supporter financièrement. En règle générale, l’employeur est chargé de fournir, d’installer et d’entretenir les équipements nécessaires au télétravail régulier et couvrir les coûts directement causés par ce travail, en particulier ceux liés aux communications, sauf si le télétravailleur utilise son propre équipement.

Il est donc conseillé de résoudre avant le début du télétravail toutes les questions relatives aux équipements de travail, à la responsabilité et aux coûts.

2) Remboursement des frais engagés par le télétravailleur : quelles sont les règles ?


Depuis l’entrée en vigueur de l’une des ordonnances « Macron » en septembre 2017 (1), l’article L. 1222- 10 du code du travail, qui prévoyait la prise en charge par l’employeur de tous les frais engagés par le salarié en télétravail, a été supprimé. L’employeur n’est donc plus tenu, légalement, de verser à son salarié une indemnité de télétravail destinée à lui rembourser ses frais, sauf si l’entreprise s’est dotée d’un accord collectif ou d’une charte mettant en place le télétravail et prévoyant les modalités de prise en charge.

Cependant, ce n’est pas pour autant que l’employeur est dispensé de toute obligation de remboursement. En effet, la jurisprudence qui s’est construite depuis l’existence du télétravail est très claire: « les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l’employeur et ne peuvent donc pas être imputés sur la rémunération du salarié » (2).

Par ailleurs, la mise en place du télétravail « imposé » en raison de l’épidémie de covid-19 n’était pas subordonnée à l’accord des salariés mais justifiée par des circonstances exceptionnelles et la nécessité de poursuivre l’activité de l’entreprise tout en protégeant les salariés. En conséquence, elle est considérée comme un simple aménagement du poste de travail.

C’est pourquoi, il convient de s’en remettre au principe général de prise en charge par l’employeur des coûts liés à l’exercice des fonctions dont il ne peut pas s’exonérer. Ce principe a été d’ailleurs confirmé par la Cour de cassation : « les frais qu’un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’employeur doivent être supportés par ce dernier […] » (3).

Ainsi, tous les frais engagés par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle doivent être pris en charge par l’employeur, y compris pour le salarié en télétravail.

Notez-le

Pour les entreprises dont le secteur d’activité est représenté par le MEDEF, la CGPME ou l’UPA, le remboursement des frais liés au télétravail est encadré par l’accord national interprofessionnel (ANI) de 2005, repris par la loi du 22 mars 2012 sur la simplification de droit des entreprises.

3) Quels sont les frais pris en charge ?


  • Les frais professionnels découlant directement du télétravail : coût du matériel et de sa maintenance, logiciels, abonnements, communications, etc. ;

  • L’indemnité d’occupation, destinée à compenser les frais engendrés par l’occupation du domicile privé du salarié à des fins professionnelles (chauffage, électricité, etc.) à la demande de l’employeur. Si le télétravail est un choix du salarié, il ne peut pas réclamer la prise en charge de frais d’occupation. Cependant, pendant l’épidémie de coronavirus, la demande de télétravail ne relève pas d’une demande de l’employeur mais d’une mesure gouvernementale pour lutter contre le virus. Bien que la loi soit muette sur ce point, il est peu probable, compte tenu du caractère exceptionnel de la situation, que le salarié puisse prétendre à une indemnité d’occupation ;

  • Les frais de transport : le télétravailleur ayant les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise (4), l’employeur doit, en conséquence, maintenir le remboursement à 50% du coût total des titres de transport de ses salariés, même lorsque le salarié est placé en télétravail ;

  • Les frais de repas : si le salarié bénéficiait de ticket-restaurant avant la période de télétravail, il conserve ce droit, quel que soit le lieu où il se trouve.

4) Quelles sont les modalités de prise en charge des frais professionnels ?


Le dédommagement des frais professionnels de télétravail peut se faire soit par :

  • le versement d’une allocation forfaitaire couvrant l’intégralité des frais de télétravail pour des frais inférieurs à certains montants. Cette allocation est automatiquement exonérée de cotisations et de contributions sociales dans la limite globale de :
    • 10 euros par mois pour un salarié effectuant une journée de télétravail par semaine ;
    • 20 euros par mois pour un salarié effectuant 2 jours de télétravail par semaine ;
    • 30 euros par mois pour un salarié effectuant 3 jours de télétravail par semaine ;
    • 40 euros par mois pour un salarié effectuant 4 jours de télétravail par semaine ;
    • 50 euros par mois pour un salarié effectuant 5 jours de télétravail par semaine.

  • le remboursement d’une allocation égale aux frais réellement supportés sur présentation par le salarié de justificatifs. Lorsque le montant versé par l’employeur dépasse ces limites, l’exonération de charges sociales pourra être admise à condition de justifier de la réalité des dépenses professionnelles supportées par le salarié.

    Auteur : Laurence Ruaux

Sources :

(1) Ord. n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail
(2) Cass, soc., 9 janvier 2001, n° 98-44.833
(3) Cass, soc., 19 septembre 2013, n° 12-15.137
(4) C. trav, art. L. 1222-9



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